Petite philosophie du marcheur

Publié le par la lectrice

Petite philosophie du marcheur

 

« Une bonne marche en montagne, lente et longue, permet souvent de réintroduire, dans l’âme et dans le corps, l’harmonie détruite par le bruit, la laideur et l’affolement de la vie citadine. »

(Rythme)

 

Au chapitre « Manifestation »

La marche peut être politique. On peut marcher pour défendre ses droits, ses idées, ses valeurs ; pour exprimer son désaccord, sa colère, son hostilité face à une décision politique et à ceux qui l’ont prise. Marcher est un moyen simple à la disposition du peuple pour participer au débat et faire entendre sa voix, ses espérances et ses refus. Elle est une possibilité d’intervention en dehors des cadres institutionnels de la vie politique, elle est un mode d’action démocratique. Les cortèges de manifestants parcourent les rues des villes en faisant résonner les slogans de leurs revendications. Ils marchent et, en marchant, ils luttent. De cette manière non vote aussi avec ses pieds.

Bien entendu, un tel acte ne présente pas le même visage selon qu’il se produit dans un régime démocratique ou non démocratique. Il ne présente pas non plus la même gravité selon l’objet des revendications et les circonstances dans lesquelles il prend place. Les risques liés à une manifestation peuvent ainsi varier et si, en certaines occasions, ils sont très faibles, parfois, ils peuvent être majeurs.

Plus le pouvoir institué se sent mis en cause –ses principes, ses valeurs, son bon droit-, plus sa riposte peut devenir violente, visant à étouffer ou à tuer dans l’œuf un mouvement dont il juge qu’el attente à sa réalité même et à sa pérennité. Ainsi dans la lutte syndicale pour des conditions de travail plus humaine telle qu’elle a été menée au XIXè siècle, de nombreuses manifestations ont pris un tour tragique et ont vu le sang couler. Les classes dirigeantes ont appréhendé ces mouvements comme autant de menaces qui se dressaient devant l’ordre traditionnel et les usages anciens qui traduisaient leur domination.

Ainsi, c’est lors d’une manifestation le jour du 1er mai 1891, à Fourmies, une petite ville du nord de la France, que les troupes ont tiré à bout portant sur la foule des ouvriers qui défilait pacifiquement. Il y eut dix morts, dont une ouvrière nommée Marie Blondeau qui se trouvait dans le cortège, tout habillée de blanc et les bras couverts de fleurs. Elle deviendra le symbole de cette journée et, d’une certaine manière, elle est le symbole de tous ceux qui marchent pour un monde plus juste.

Quand nous défilons, le 1er mai ou en d’autres occasions, nos pas se glissent dans ceux de Marie Blondeau ; souvenons-nous d’elle.

 

Au chapitre « balade »

Qu’un pareil verbe, « muser », ait disparu de notre vocabulaire en dit long sur le caractère sérieux et industrieux de notre époque. C’est presque un péché que de perdre son temps et, plus que jamais, on prend à la lettre l’avertissement populaire qui veut que l’oisiveté soit la mère de tous les vices. On n’a plus le temps de flâner parce que le temps, c’est de l’argent.

 

Au chapitre « inertie et mobilité »

La marche est une activité humaine précieuse et fondamentale. Sa réduction, voire sa quasi-disparition, augurerait d’un monde voué aux machines, c’est-à-dire d’un monde tout entier dédié au rendement.

 

N’est-ce pas finalement ce qu’il se passe avec l’omnipotence de l’automobile : transports, travail, industrie ? le secteur automobile reste l’employeur clé du système économique, avec la sous-traitance, les emplois d’intérimaires liés au marché, les lois pour relancer les ventes comme les primes à la casse, et, à présent, l’illusion écologique avec les nouveaux moteurs, les voitures électriques…

 

Chapitre « la morale du lacet »

Les uns à côté des autres, nous fonçons, qui vers le pouvoir, qui vers la célébrité, qui vers la richesse, qui vers le confort, qui vers la tranquillité… Vite, nous courons, enfermés en nous-mêmes comme des petites monades sans portes ni fenêtres.

 

Le terme « monade », employé en métaphysique, signifie étymologiquement « unité ». C'est l'Unité parfaite qui est le principe absolu. C'est l'unité suprême, mais ce peut être aussi, à l'autre bout, l'unité minimale, l'élément spirituel minimal.

 

Chapitre « dans le jardin d’Épicure »

A l’intérieur du jardin, il est possible de retrouver son autonomie, de décider des règles auxquelles on pliera son existence. La philosophie doit se situer sur un plan éthique, celui qui concerne l’individu en tant que tel, et non plus sur un plan politique, d’où la liberté a déserté. Si l’agora est le lieu de la politique, le jardin est le lieu de l’éthique, c’est-à-dire d’un certain art de vivre.

 

J’apprends ce jour que je suis milliardaire car je fais mes petites courses chez Vival, coeur de ville, plutôt qu'à...

Dijon à 60km....

en fait, c'est quoi que vous ne comprenez pas les gens ?

Extrait - réflexion dans ce livre en cours de lecture (Merci la Médiathèque) - c'est sur le temps, mais c'est valable aussi pour l'argent...

"En fait, nous devons aussi comptabiliser le temps qui nous est nécessaire pour payer notre voiture et l'entretenir: combien cet achat et cet entretien nous demandent-ils d'heures de travail ? En regard, combien de temps de travail nous faut-il pour l'achat d'une paire de chaussures afin d'effectuer notre trajet quotidien? Si, à la lumière de ces nouvelles exigences, nous refaisons nos calculs, il est possible que nous parvenions au résultat selon lequel il faut beaucoup plus de temps pour se rendre à son travail en voiture que pour s'y rendre à pied."

(Christophe Lamoure - Petite philosophie du marcheur)

 

Livre pouvant être utile au marcheur débutant ou en passe de l’être. Encore faut-il que l’esprit du leur soit ouvert ou prêt à s’ouvrir à la philosophie, que le lecteur soit en recherche d’un retour à lui-même, à l’humain.

Si c’est déjà fait, lisez-le si vous avez le temps, … pour vous reposer de votre marche.

 

Petite philosophie du marcheur de Christophe Lamoure

Éditions Milan – 2007

Neuf : 15euro -  emprunté à la médiathèque

LAMOURE et KUNDERA

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