le goût des pépins de pomme

Publié le par lectrice

À éviter si l’on a du mal à suivre une foule de personnages, leurs interactions, et surtout les multiples retours en arrière, et les passages d’un sujet à un autre… parfois dans le même paragraphe.

L’auteur raconte un moment de vie passé et la phrase suivante nous sommes de retour à l’actualité et à sa tasse de thé. Façon de montrer que la narratrice était partie dans ses pensées et que d’un coup il faut boire ce thé qui va refroidir ou erreur de coupure de paragraphe lors de la traduction ou de l’impression, allez savoir.

Une petite scène de flirt ou la traductrice choisit ce mot relativement vulgaire finalement dans le contexte d’un couple se rapprochant dans des serviettes mouillées. Pourquoi ne pas employer le vrai terme, de pénis ou de sexe tout simplement ? voici bien un terme, queue, qui arrive comme un cheveu sur la soupe romanesque ! (rires).

Une fois n’est pas coutume dans mes lectures, l’histoire se déroule en Allemagne, dans une famille allemande. La grand-mère, veuve, est décédée après quelques mois passés en maison de retraite et le cerveau en pagaille. Les trois filles et la petite-fille héritent. La narratrice, hérite de la maison. Ceci posé on comprend de suite que l'on va remonter dans les événements divers et variés de cette tribu très féminine où les hommes n’ont fait que passer. Le décor est planté dans cette bâtisse héréditaire qui abrite certainement tout un tas de secrets qui, on l’espère, vont se dévoiler au fil des pages.

Prenez des notes si vous avez du mal à suivre !!! Notez l’arbre généalogique, et à quelle page on relate tel ou tel décès et de quelle façon… Mais non, ce n’est pas un roman policier…

 

Morceaux choisis :

Page 47  Iris, la narratrice, retrouve le village de son enfance, la petite rivière où ils allaient se baigner, le jardin… la balade à vélo pour aller à la rivière…

« …je m’engageai à droite sur le trottoir, poussai le vélo dans l’entrée, je n’avais pas fermé à clé le portillon, patouillai à travers les myosotis et déposai le vélo devant la porte de la cuisine. La grande clé me laissa entrer.

….

« Je me jetai sur le lit de ma mère, le lit venait d’être fait, mais par qui ? Derrière les jours de la broderie anglaise chatoyait un oreiller lilas. Les jours représentaient des fleurs. Des fleurs figurées par des trous. Des trous dans l’oreiller. Ce qui n’était pas là, voilà ce qui comptait dans ce type de broderie. Tout l’art, c’était ça. S’il y avait trop de trous, il ne restait rien. Des trous dans l’oreiller, des trous dans la tête. »

broderie sur drap ancien

broderie sur drap ancien

Pages 22-23 les livres, Iris est bibliothécaire… (photo )

« J’ai commencé par faire des études de lettres allemandes, et les travaux dirigés auxquels j’ai été amenée à participer m’ont permis de constater rapidement que tout ce qui vient après les recherches bibliographiques ne présente aucun intérêt pour moi. Catalogues, tables des matières, manuels, index ont leur propre beauté discrète, une beauté qui ne vous apparaît pas davantage à la première lecture que celle d’un poème hermétique. Lorsque je me détourne d’un ouvrage général de référence et de ses pages écornées par d’innombrables consultations et que je passe ensuite à tâtons de livre en livre pour tomber finalement sur quelque monographie hautement spécialisée que nulle main, hormis celle d’un bibliothécaire, n’a jamais saisie, cela déclenche en moi un sentiment de satisfaction intense, totalement différent pourtant de celui que me procurent mes propres récits. Quant aux notes que l’on prend pour mémoire, elles correspondent en fait très exactement à ce qu’il n’est nul besoin de retenir, je veux dire à ce que l’on peut tranquillement oublier dans la mesure où l’on sait, dès lors, où l’on pourra le retrouver.

L’aspect le plus plaisant de mon métier consiste pour moi à dénicher des livres oubliés, des livres qui sont rangés à leur place depuis des centaines d’années, des livres qui n’ont sans doute jamais été lus, dont la tranche est encroûtée de poussière et qui n’en ont pas moins survécu à des millions de non-lecteurs. J’ai repéré sept ou huit livres de cette sorte et je leur rends visite à intervalles réguliers, mais sans jamais les toucher. Occasionnellement, je les renifle un peu. Comme la plupart des livres de bibliothèque, ils sentent mauvais, une odeur de moisi. Le livre consacré aux frises de l’ancienne Egypte est assurément celui qui sent le plus mauvais, il est noir, repoussant. »

S’en suit, immédiatement après le point, dans le même paragraphe, 4 lignes sur la grand-mère à la maison de retraite. Sans rapport avec le texte sur les livres…

livre ouvert

livre ouvert

Pages 164-165 – petite poésie hivernale

« En hiver vient le bonhomme gris

Le gel, le gel, mon enfant ;

Et çui qui n’a de chauds habits,

Il a tôt fait de claquer des dents.

Il crache, il éternue, il tousse

Ensuite son nez se bouche

Puis devient tout rouge et coule à flots –

Oh ! l’hiver apporte bien des maux.

Dans la maison en solitaire,

Toute la sainte journée il erre,

Et pas une fille, ni blonde ni brune,

Ne veut d’un gars qui a le rhume.

Solitaire dans le jardin il se traîne,

La goutte au nez, le cœur en peine :

Les filles, elles s’écartent de sa route

Par peur, par peur des petites gouttes.

 

Page 169 – des inscriptions vengeresses ont été faites sur le mur du jardin… extrême droite, extrême gauche… mais bref…

« Car il n’y a pas de front de droite … Ni d’ailleurs de front d’aucune sorte. Hormis le front des laveurs de voitures et celui des cultivateurs-de-géraniums-en-pots-et-en-jardinières-de-béton. Il se passe si peu de choses ici que je vais parfois m’asseoir au cimetière pour y boire un coup de rouge, et je fais cela uniquement pour qu’il se passe enfin quelque chose. Je suis un type qui s’ennuie à mourir et qui est tout juste assez intelligent pour s’en rendre compte. Pas de chance pour moi. »

 

Page 171, on circule beaucoup à vélo, on est en Allemagne… et pour un roman, c’est sans doute plus aisé.

« Pour ne pas être gênée à vélo, elle avait retroussé sa robe jusqu’au-dessus des genoux, les pinces à linge se couchaient à l’horizontale sous l’effet du vent. Je devais rouler derrière elle car je vois encore des taches de rousseur dans ses creux poplités. Mais peut-être ce souvenir est-il lié à une autre excursion à vélo »

Poplité:  Le muscle poplité est un muscle triangulaire de la loge postérieure et profonde de la jambe, en arrière du genou.

Le goût de pépins de pomme (Der Geschmack von Apfelkernen) de Katharina Hagena

Traduit de l’allemand par Bernard Kreiss

Éditions Anne Carrière 2010 (Verlag Kiepenheuer & Witsch, Cologne, 2008)

Mon exemplaire : livre de poche 2011

Couverture : AKG Images

 

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A
La goutte au nez du bonhomme d'hiver! Hmmm.....ça s'interroge! Que l'autrice sur le divan virtuel prenne place pour un quart d'heure "association libre". Quoique....à chaque lecteur de s'y coller
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